Les abeilles grises - Andreï Kourkov - 4/5

Dans un village entre Ukrainiens et séparatistes, il ne reste que deux hommes, ennemis d’enfance : Sergueïtch et Pachka.
Sergueïtch, apiculteur, après l’hiver va décider de prendre la route avec ses abeilles pour leur trouver une terre plus paisible.

Un roman a plusieurs personnages :

  • Sergueïtch : l’apiculteur
  • Pachka : l’ennemi d’enfance
  • Les abeilles
  • Le silence

Le silence, c’est vrai, est chose capricieuse, phénomène sonore personnel, chaque individu l’ajuste, l’adapte à sa mesure. Autrefois, le silence pour Sergueïtch était le même que pour les autres. Le bourdonnement d’un avion dans le ciel ou le chant d’un grillon s’introduisant la nuit par le vasistas en faisait facilement partie. Tous les bruits discrets, qui ne suscitent pas d’agacement ni ne font se retourner, deviennent au bout du compte des éléments du silence. Il en était ainsi autrefois du silence de la paix. Il en était devenu ainsi du silence de la guerre, où le fracas des armes avait évincé les bruits de la nature, mais à force de lassitude, était devenu coutumier, s’était comme glissé lui aussi sous les ailes du silence, avait cessé d’attirer l’attention sur lui.

Dans certains romans, l’un des personnages est l’obscurité, ou la ville ici le silence est omniprésent.
Sergueïtch et Pachka sont deux grands taiseux.
Il y a tout au long du roman une grande place pour la contemplation et surtout les non-dits.

« Non-dits » qui servent avec subtilité un des moments drôles du roman : Sergueïtch est interviewé à propos de son village. Il parle des deux factions : les Ukrainiens et les Russes. Lui qui parle si peu, en dit là un bien trop pour les journalistes présents (nous sommes en Crimée).

Il faut savourer ces dialogues qui en disent plus par ce qui est omis.

Il règne malgré son apparente simplicité une tension dans le récit.
Le village est en sursis.
Une mauvaise rencontre, une mauvaise parole, une mauvaise route, un SMS peuvent suffire à mettre l’honnête homme sous la coupe de la violence, de l’arbitraire.

Sergueïtch va quitter son village pour la Crimée. Il faut pour ses abeilles des fleurs et un calme, un silence qui ne soit pas perturbé par les bombardements.
Un voyage plein de belles rencontres. Mais le drame, l’arbitraire n’est jamais loin.
J’ai craint pour Sergueïtch.
J’ai craint que sa simplicité que son côté inoffensif ne le protège pas.

J’ai compris qu’il y a peu de place pour une vie hors de la guerre, de la violence.
Qu’il y a peu de place pour le vrai silence, mais beaucoup pour « passer sous silence » la guerre et les victimes.

Pour aller plus loin

Lisez l’interview de l’auteur dans le guardian



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