Utopia - Ahmed Khaled Towfik - 4/5

Utopia Le Caire, 2023. À l’abri de hauts murs barbelés, la jeunesse oisive de la colonie d’Utopia s’ennuie. Seule « la chasse » procure le grand frisson et a valeur de rite initiatique. Le but : s’introduire dans les bidonvilles, tuer un pauvre et ramener une partie de son corps comme trophée. Un jeune homme et sa petite amie ont décidé de goûter à la poussée d’adrénaline. Mais leur immersion dans les bas-fonds du Caire, véritable cour des miracles post-apocalyptique, se révèle plus dangereuse que prévu. Démasqués, traqués par une population haineuse, ils vont à leur tour devenir la proie des chasseurs. Parviendront-ils à sauver leur peau ? Texte coup de poing, Utopia est un cri d’alarme sur les clivages sociaux et la disparition des couches moyennes en Égypte. « Encore plus cauchemardesque qu’Orange mécanique, Utopia est un petit chef-d’oeuvre. Je défie quiconque de ne pas le lire d’une seule traite. » The Independant (Égypte)

Cadre de ce billet

J’ai reçu ce roman dans le cadre d’une opération masse critique” par Babélio J’avais entendu parlé du roman chez Gromovar Il ne pouvait pas en dire beaucoup. C’était intriguant.
Quoi de mieux qu’une masse critique pour découvrir ce roman ?

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Mon avis

C’est un roman sombre très sombre comme une nuit sans étoile, sans espoir.
Sombre, mais proche. Pas de bond dans un futur lointain, pas de vaisseau spatial, d’androïde ….Juste l’humanité… Une humanité divisée en deux.
On reconnaît beaucoup d’ingrédients déjà présents comme les Gated Communities.
Je n’ai pas pu m’empêcher de faire le rapprochement avec la Foire aux Immortels d’Enki Bilal.
Comme chez Bilal, il n’y a plus de classe moyenne, plus de milieu stabilisant et modérateur.
D’un côté :

  • Une classe aisée dirigeante retranchée derrière ses murs pour vivre une vie décadente.
  • De l’autre une population ignorante, misérable, abandonnée.
  • Entre les deux des barrières : Une barrière physique tenue par des mercenaires. Une barrière mentale de haine et de mépris.

Les deux communautés se rejoignent quelque part, dans leurs rêves. Elles n’en ont plus (pour des raisons différentes).
Plus personne n’a d’idéaux !
La description de la classe opulente m’a semblé manquer un peu de crédibilité. Pourquoi ? Par ses excès ahurissants, son nihilisme absolu, sa perte de valeurs.
Le train de vie par contre ne m’a pas surpris.

La description de la classe opprimée est bien vue : comment la suppression de tout espoir et la plongée dans la misère renvoient les gens dos à dos dans un espèce de chaos violent, mais égalitaire. Les distinctions sont abolies. Les femmes sont exploitées. Les religions ont perdues de leur importance.
Dans ce monde, il n’y a pas d’espoir. Ici point de Roméo et Juliette !! Ne cherchez pas de compréhension entre ces deux humanités séparées.
C’est d’ailleurs le point le plus angoissant du roman : au final, aucun pont ne peut plus être jeté entre ces deux peuples.

C’est un miroir…

Ce roman est en quelque sorte un miroir déformant qui nous est tendu : nous n’aimons pas l’image qui nous est renvoyée, mais fasciné nous regardons quand même.
C’est un plaidoyer cruel contre les inégalités qui nous aliènent, contre le chaos qui nous attend si nous abandonnons toute perspective de vivre ensemble.
Pour finir, donc un très bon roman efficace et qui interpelle.
Je me demande quel accueil il a reçu en Égypte. Si vous avez des informations là-dessus je serais très intéressé.

Écriture

L’écriture est efficace, directe sans être simplifiée. Les dialogues ne tombent pas dans un parlé déstructuré/désortographié “à la djeunz” tout en restant crédibles.
L’auteur est un bon observateur de la société.



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