Récidive 1938 - Michaël Foessel - ★★★★★

En 2018, le philosophe Michaël Foessel se plonge dans la presse de 1938.

La question pertinente n’est plus « Que s’est-il passé dans les années 30 qui pourrait peut-être revenir ? », mais « De quoi les années 30 sont-elles la manifestation, et en avons-nous définitivement fini avec cela ? »

Pas de stérile comparaison dans cet essai. On ne rejoue pas les années 30. Pas d’excès inverse qui nierait toute ressemblance.
Le XXIᵉ siècle n’est pas exempt des mêmes travers. Nous n’avons pas fait table rase de nos faiblesses, de nos haines.
En parlant de haines, nous savons où nous ont mené les années 30. L’anti-sémitisme s’exprimait librement.
En y ajoutant notre recul, les années 30 en France nous paraissent bien plus transparentes et faciles à lire.
Pas de parallèles, mais des démons communs.
Un acharnement à revenir sur les acquis du Front Populaire.
L’ordre, le travail, remettre la France en ordre.
Une véritable obsession.

Et petit à petit, on grignote la démocratie de décret en pouvoir exceptionnels en mesures d’urgence.
On pourrait croire que ces appels à l’ordre, au travail, au retour du prestige de la France permettent une préparation, une mobilisation face aux dictatures ?
Absolument pas !
On se mobilise face à l’ennemi intérieur (le racisme décomplexé de l’époque est effrayant) : le juif, le métèque, les réfugiés que l’on ne peut pas accueillir.
Bien avant la défaite de 1940, on commence les camps, on accepte de ne plus avoir que des ministres ariens (sous l’aimable suggestion de Ribbentrop de passage avec sa « souriante épouse »).

On est frappé du glissement des partis vers la droite, l’autoritarisme.
Un glissement de valeurs que l’on reconnait.

Les dirigeants totalitaires ne nourrissent pas beaucoup mieux leur peuple, mais ils lui donnent en compensation un nouvel objet à haïr.

Les voies qui identifient la menace nazie sont rares.
Pour les réactionnaires, l’ennemi ce sont les acquis du Front Populaire accusé d’avoir affaibli, ramolli la France.

les journaux fascisants ne veulent à aucun prix d’une guerre avec des régimes autoritaires qui leur conviennent en tout point, le véritable ennemi est intérieur. La guerre des mots est une guerre civile française.

Au passage, on oublie tout simplement la plus grande crise économique de tous les temps : la crise de 1929. La crise de 1929, 10 ans avant 1938, comme la crise de 2008 littéralement oubliée en 2018.

En conclusion

C’est une plongée dans la presse de 1928 pour « sentir » l’atmosphère de l’époque.
C’est édifiant : on perçoit le lent glissement vers l’autoritarisme.
On le perçoit mieux avec le recul : Pourquoi ne le voit-on pas aujourd’hui ?

La contagion des dictatures se nourrit d’abord du reniement des démocraties.

Apartée : Pour comprendre la crise de 1929

Sur la crise de 1929, je vous conseille vivement les vidéos d’Heu?reka :

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